Il y a quelques jours, une question m’a été posée en stage : « Quelles sont exactement les différentes phases de la chaîne prédatoire chez le chien ? » Cette interrogation, simple en apparence, ouvre en réalité sur un sujet fondamental, souvent mal compris ou interprété à tort comme de l’agressivité. Elle m’a donné envie de poser par écrit une réponse claire, structurée et accessible à tous ceux qui travaillent de près ou de loin avec les chiens.

La prédation est un comportement instinctif profondément ancré dans l’héritage génétique du chien. Bien que modulée par la domestication et la sélection humaine, cette chaîne comportementale reste présente à différents degrés chez tous les individus. Comprendre les sept étapes clés de cette séquence — de la localisation à la consommation — est essentiel pour mieux prévenir, canaliser ou réorienter ce type de comportement.

Décryptons ensemble ce que recouvre réellement la chaîne de prédation chez le chien, afin de mieux distinguer instinct naturel, comportement problématique et besoin d’expression.

1. La localisation de la proie
Cette première étape repose sur l’utilisation des sens, principalement l’odorat et l’ouïe, pour détecter la présence d’une proie potentielle dans l’environnement. Le chien hume l’air, dresse les oreilles, scrute les mouvements à distance. Cette phase, souvent discrète, peut précéder toute excitation visible.

2. Le repérage à vue
Une fois la proie localisée, la vision prend le relais. Le chien fixe alors intensément sa cible, adopte une posture tendue, parfois basse. L’attention est focalisée, le reste de l’environnement devient secondaire.

3. L’approche
Cette phase est marquée par une avancée lente et silencieuse, parfois rampante. Elle permet au chien de se rapprocher sans alerter la proie. C’est une étape clé chez les races de chasse ou de troupeau, souvent exagérément renforcée par la sélection (comme chez le Border Collie).

4. La poursuite
Si la proie prend la fuite, la poursuite s’enclenche. Ce comportement est extrêmement gratifiant pour le chien, même en l’absence de capture. Il sollicite l’instinct de course, souvent difficile à inhiber une fois déclenché. Cette phase peut être très longue.

5. La capture
Chez les chiens domestiques, cette phase est très variable. Certains n’iront jamais jusqu’à tenter de saisir la proie (races de chasse à l’arrêt), d’autres mimeront la capture dans le jeu (secouer un jouet), tandis que certains individus capturent réellement, notamment en présence de petits animaux.

6. La mise à mort
Ce comportement existe encore dans certaines lignées (terriers, chiens de chasse, chiens errants). Il consiste à infliger des morsures létales ou à secouer violemment la proie pour l’achever.

7. La consommation
Très rarement observée chez les chiens domestiques bien nourris, la consommation marque l’aboutissement complet de la séquence. Elle peut toutefois se produire dans des contextes particuliers.

La domestication et la sélection humaine ont fortement modulé cette chaîne comportementale chez le chien. Chez certains, seules les premières phases (localisation, repérage, approche) sont présentes, comme chez les chiens de troupeau. D’autres ont des séquences exacerbées et peu contrôlables (chiens de chasse, lévriers).

Comprendre quelle partie de la séquence est active chez un individu permet d’adapter l’environnement, les outils de gestion et le travail comportemental. Un chien qui « court après les vélos » ne cherche pas forcément à mordre, mais peut simplement exprimer une pulsion de poursuite incomplète.

Un comportement naturel, pas pathologique
La prédation n’est ni une agression, ni un trouble du comportement. C’est un comportement inné, extrêmement motivant et gratifiant. Le rôle des professionnels est donc d’identifier ces séquences, d’en analyser les déclencheurs, et de proposer des exutoires adaptés (jeux de recherche, sports canins, travail de flair…).

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